La métamorphose de l’équilibriste.

I Remember You ©1999

De l’inhumanisme à un humanisme éclairé.

Voici quelques propos très personnels, non édités et crus, écrits durant les vingt dernières années de 2001 à 2020 :

On m’a parfois demandé pourquoi je peignais.

…Et bien, je dois dire que du côté de mon évolution personnelle, je vis des choses assez surprenantes comme des sortes de sauts quantiques que je ne contrôle pas.

J’élabore mes idées au fil du temps sur des thèmes de liberté, d’intuition et d’être. Je pose des questions et j’attends l’intelligence des réponses de celui que je deviendrai, lui pourra regarder ces questions autrement et de loin en offrant de nouvelles perspectives.

Je fais des conférences sur l’égo, l’ennemi public numéro un de notre bien-être intérieur. Je m’interroge : suis-je ce que je pense être ou bien suis-je autre chose ? Toutes ces pensées de moi-même qui se bousculent, en vérité depuis la naissance, images de soi que nous avons tous et défendons avec passion ou détermination mais qui n’ont absolument rien à voir avec notre vraie nature…que nous ignorons encore et toujours.

Se réveiller de nos cauchemars quotidiens à chaque moment. Nous sommes là, vivants et c’est l’essentiel. Martin Heidegger, ce philosophe allemand, m’a posé une colle magnifique en me soufflant à l’oreille : Why being instead of nothing? Pourquoi l’être au lieu de rien ? Pourquoi suis-je là au lieu de rien ?

Nous ne sommes pas victimes de ce monde en réalité, mais au contraire nous le sommes par choix désavoué, c’est-à-dire à partir de nos identifications secrètes et cachées aux choses qui nous blessent, nous humilient, nous déçoivent, nous dégoutent et nous écrasent.

La métaphore de l’équilibriste m’attire et je demande comment rester dans le présent entre ces deux grands ravins que sont le futur et le passé. Je vois cela comme un thème d’exposition plus tard.

Je m’acharne à l’éveil. Il ne suffit pas de l’idéaliser, chose séduisante, d’autant plus que le piédestal est encore bien à la mode. C’est ce que je vis, parfois très mal.

Des images de moi se transformaient en belles images fécondes de moi. Quelle mascarade ! Je dis non ! Aujourd’hui le combat c’est l’éveil. Dans l’instant présent, il n’y en a pas d’autre, je me réveille de mon sommeil ancestral où je n’étais pas encore moi. Il ne s’agit en aucun cas de rêver d’un monde meilleur dans l’espace inachevé du futur.

L’instant est toujours à notre portée. Nous choisissons la souffrance, Il faut avoir le courage de le dire. Tout le monde parle de futur ou de passé et ce, plus ou moins bien. Le passé est une drogue sans merci. Il faut percer le présent dans chaque rencontre (voilà un autre thème d’expo).

L’humain sera toujours conditionné et deviendra inhumain sans le savoir. On pourrait avoir mille deux cents ans et, depuis tout ce temps que nous aurions vécu, on s’apercevrait que le futur n’a rien changé à l’humain, cette bête pauvre et sombre, fatiguée et triste, déprimée, opprimée, malade, frustrée, en colère et pleine de haine ou de blâme. On peut penser ce que l’on veut de Freud mais il avait compris le système : l’objectivation de l’amour narcissique.

« C’est l’anxiété qui produit la répression et non pas l’inverse et qu’il n’y a que l’égo qui puisse souffrir l’anxiété » disait Freud.

« L’anxiété, nous dit encore Freud, c’est la mémoire du danger d’il y a longtemps », celui qui n’existe plus mais se ranime à la vue d’objets, de sons, de mots ou de sensations et nous replonge dans la mémoire ou le souvenir inconscient d’une situation non résolue à une époque ou nous avions manqué de courage, d’intelligence, de compréhension, quand nous nous étions laissés incarner en victime, qu’il se soit passé quelque chose ou pas.

Il nous faut du courage pour être pauvre, notion romantique de la croyance en Dieu ? Catho ? Non, je crois qu’il nous faut voir à travers ces rôles que nous nous jouons en permanence. Ah, si l’être pouvait l’emporter à chaque fois sur le paraître !

Il faut avoir le courage de rester présent dans les tempêtes, ça, ça c’est du courage. L’être n’a pas d’identité pure, là est notre stupéfaction et notre connexion inconsciente au Bouddhisme. L’égo adorerait se l’octroyer ce faux courage. C’est la clef de l’univers, tu parles ! La transparence est la clef, de s’ouvrir à l’inconnu qui nous vole le confort de nos certitudes. Il n’y a pas de pensée neutre, il n’y a que des aprioris, des perspectives politisées et des mensonges trop parfumés sans conscience véritable.

Souvenons-nous de qui nous sommes. Nous sommes maitres de tout en fait. Il est toujours bon de nous laisser comprendre notre état originel. Laisser l’inhumain faire ses mascarades et à la place s’abandonner à être. Paradoxe que nous ayons pris l’appellation « être » humain avant que Heidegger y apporte son grain de sel.

Il n’y a rien de mal à être inhumain, je m’aperçois dans mon cas que c’est lorsque l’inhumain veut s’octroyer l’être que tout déraille. Cette faim irrationnelle de contrôle et de domination sur tout. L’inhumain c’est ce conditionnement depuis la nuit des temps. La peur en est au centre. L’inhumain a peur donc il s’occupe. Il fouine, il s’empare d’expériences de toutes sortes, il brule sa flamme olympique sans comprendre qu’il se cherche lui-même et ne se trouvera jamais.

J’ai l’impression d’avoir encore passé un cap. Une étape dans mon détachement ? Qu’il n’y a rien à savoir, à comprendre, à apprendre, il n’y a rien à atteindre tant qu’il n’y a pas d’éveil. Tout est apparence momentanée et plus ou moins floue.

Casser le traditionnel, comprendre le dualisme qui nous étouffe, rendre l’art un dialogue, une conversation, moins un effet objet pour satisfaire les divans des bourgeois (sens amical puisque ce sont eux qui achètent) et leur faire oublier encore plus fort qu’ils sont endormis, ou pire qu’ils ont raison de l’être.

L’art est une marchandise rien de plus aujourd’hui. Il a temporairement perdu son sens profond et primaire. Nous sommes à un grand carrefour humanitaire ? Depuis le temps qu’on entend ça…

Moins en moins de gens vivent, ils survivent à peine. Il n’y a que le réveil intérieur qui puisse faire quelque chose. Agir sur l’inconscient pour qu’il redémarre dans le bon sens du grand carrefour humanitaire annoncé. L’art a commencé dans les grottes pour nous en sortir. Sortir de notre conditionnement obsessif et sentant l’addiction totale. Destinée quasiment robotique.

Aimer l’art en nous et non pas nous-mêmes dans l’art c’est Stanisvlaski en Russie qui le déplorait déjà avant 1900 ! Enlever ce côté élitiste nauséabond de l’art. Le côté réservé aux autres classes. Ne pas s’en servir pour diviser mais bien pour éduquer. Montrer le chemin de l’éveil. Sortir du conditionnement. Retrouver la liberté égarée. Ne plus s’identifier au matériel mais simplement de s’en servir. Chercher l’inévitable. Crever les apparences.

C’est l’identification à nos pensées qui nous empêche de voir, de sentir, de respirer la vie à l’intérieur : l’être.

La pensée est en évolution perpétuelle, elle se cherche, elle évolue sans notre avis. C’est l’énergie universelle qui danse en nous.

L’art est prisonnier des toiles, du bronze, de la galerie, du musée. Il n’y a rien contre mais l’art est en nous, pas à l’extérieur. Lâcher prise ! Lâcher du leste. Ouvrir les portes.

C’est la nature inhumaine que nous combattons chez les autres comme nos présidents, les terroristes…L’injustice est en nous, le racisme aussi, l’oppression, la tyrannie, la violence, le conditionnement est partout et plus présent encore aujourd’hui grâce à la technologie. Plus visible bien que mieux déguisé, le grand paradoxe du monde moderne où tout le monde est une star fausse revanche contre la providence.

Tout conditionnement est répressif et oppressif il faut en prendre conscience et le dépasser, voire le transcender. L’art doit contribuer au réveil, aider à être. L’art est un éveil. L’art c’est de montrer du doit l’inimaginable mystère qui nous entoure et de ne pas avoir peur. Lever la tête haute et y rester. Se détacher de l’inhumain. Se donner. Se rendre. S’abandonner à l’énergie atomique et génétique que nous sommes avant tout.

Regarder l’égo pour ce qu’il est : l’illusion de nos fausses identités et de nos faux futurs eux tout aussi illusoires.

Tous nos systèmes inégalitaires ont été créés par l’égo, le faux en nous. Tous nos systèmes politiques et économiques sont basés sur la peur. « L’enfer c’est les autres » Ne plus vivre et tout décider dans sa tête.

Donner libre cours à l’esprit, la vie, faire confiance, se lâcher, se détendre, s’abandonner. S’apercevoir que chaque geste est une création, l’art n’appartient pas qu’aux artistes, c’est le commercialisme de l’art et les élites qui vous le confirmeront pour monter la cote. Pas plus que la politique n’appartient aux politiciens mais à chaque individu et à la totalité. Le plus grand art c’est d’être soi au seul titre de soi-même et de n’obéir qu’à ses propres lois et règles

L’art est en nous, il suffit de le réveiller. En se lâchant, nous créons une harmonie de gestes et de pensées. Nous ne sommes plus prisonniers de la peur qui nous empêche de voir et de se donner de l’amour. Il y a autant de sortes d’amour que de flocons de neige dans les hautes montagnes en hiver.

L’amour est la seule vraie monnaie. Assez de ce monde divisé qui n’a de fin réelle que de remplir les cimetières. Le vrai sens du global c’est d’accepter tout en entier, au complet, ça veut dire aimons-nous tout simplement, comme nous sommes et quand nous le sommes, dans la diversité et les contradictions les plus absurdes. C’est ça la tolérance !

Première étape : l’amour est en nous, la deuxième c’est de comprendre que nous sommes cet amour désespérément recherché.

Trouver la joie égarée, à mille lieues de nos sarcasmes et de notre amertume. Nous avons assez de ressources pour prendre soin les uns des autres sans faire la guerre et sans mentir, sauf à nos enfants quand ils attendent le père Noël qui descendra du ciel avec ses jouets par milliers.

Mais la guerre, comme tout, est à l’intérieur pas à l’extérieur. Il faut donc guérir l’intérieur. Se chercher dans la joie comme dans la mélancolie avec ou sans extase créative.

Ne plus se chercher dans le mensonge, l’évitement, la politesse et l’implicite.

Philippe Benichou ©2020

Philippe Benichou, also known as Eric Stone, is a French-American artist currently living in Bédoin, Mont Ventoux, France. Born in France in 1957, his mother, Arlette Oger, and his uncle, Jean Oger, were recognised artists in France. Philippe is also a highly respected figure within the performing arts field as an actor, voice artist and director. He’s the original founder of the Hollywood Actors Studio where he has taught and lectured on acting, creativity and artistic self-expression since 1989. Philippe formally studied with well-known art educator and sculptor Francis Coelho, in San Francisco, CA. Exhibitions of his work have taken place worldwide including those at MOCA Museum of Computer Art in New York and his paintings are found in many public and private collections in the U.S. and Europe. He is the recipient of awards in United States for his artistic merit. He continues to study art as it relates to self-realization and the healing powers of color and abstract compositions.

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